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Les abonnements numériques, une arnaque?

Cet article s’inspire d’un billet de blogue intitulé « La grande arnaque de l’abonnement numérique », publié sur le site Les Affaires. Est-ce que les grandes entreprises abusent vraiment de leurs pouvoirs pour imposer aux consommateurs impuissants des produits par abonnement? Est-ce qu’acheter son logiciel est vraiment plus économique? J’aimerais jouer l’avocat du diable et démontrer que ce n’est pas une option si épouvantable…

Un produit qui s’améliore, toujours à jour

Dans l’article, on donne l’exemple d’un abonnement au service numérique Spotify, qu’on compare à l’achat de CDs: si on achète des disques compacts, après 10 ans, on conserve les disques. Avec Spotify, on a payé 1200 dollars, et il ne nous reste rien.

Le nouveau Columbia s’appelle Spotify, et si le premier mois est gratuit, il vous propose quant à lui de payer 1200$ pour 10 ans, et au terme de cet investissement, de vous retrouver avec… rien!

La grande arnaque de l’abonnement numérique

Personnellement, après 10 ans, j’ai une caisse CDs que je n’écoute plus, que je ne peux plus lire parce que je n’ai plus de lecteur de CD, qui ne valent rien, qui prennent la poussière et se dégradent lentement mais surement. Comme investissement, ce n’est pas terrible.

On peut toujours acheter des CD et même des vinyles, si ça nous chante.

Les logiciels par abonnement

Dans l’article, on dénonce aussi les « compagnies en position dominante » d’appliquer le principe d’abonnement aux logiciels.

Quand on achetait un logiciel (je parle au passé!), on se retrouvait après quelques années avec un logiciel désuet… Et il fallait payer de nouveau pour avoir la toute nouvelle version de son logiciel. Avec un abonnement, on aura toujours la dernière version.

Je ne connais personne qui utilise encore sa pile de disquette d’Office 98.

Pas d’attente pour les innovations

La formule par abonnement permet aussi aux entreprises d’offrir les correctifs et améliorations dès qu’elles sont à point plutôt que d’attendre pour les intégrer à la prochaine version.

Avant, on possèdait son logiciel à vie… Mais on devait acheter la nouvelle version pour obtenir les fonctions cool.

Le coût d’entrée diminue

Combien coûtait la version de base de Photoshop CS6 à son lancement en 2012? 1299 USD. Je ne connais personne qui l’achetait vraiment – on trouvait une copie piratée. C’était – et c’est toujours – un logiciel conçu pour les professionnels, avec des fonctions avancées de correction et d’impression.

Photoshop CS6, est la dernière version de Photoshop offerte en version perpétuelle. Adobe propose maintenant ses logiciels par abonnement avec son forfait Creative Cloud.

Un abonnement à Photoshop coûte aujourd’hui 9,99 USD par mois. Il faudra s’abonner pendant 12 ans pour que ça coûte plus cher qu’acheter sa copie! À ce prix mensuel, on a aussi accès au logiciel de retouche Lightroom. Une version pour étudiants permet d’avoir accès à toutes les applications d’Adobe pour 20 USD par mois – une option beaucoup plus abordable qu’avoir à acheter les logiciels individuellement; le coût par session est beaucoup moins élevé.

Ça vaut aussi pour la version Famille et étudiants d’Office 2010, qui coûtait 149 USD, autour de 200 CAD. L’abonnement à Office 365, la version par abonnement, est 79 CAD par année, avec une version familiale pour 6 utilisateurs à 109 CAD par an. Dans ce cas, on paiera plus que la version perpétuelle environ aux 2 ans.

Le prix augmente trop? On cesse d’utiliser le logiciel? Plus envie de payer? On peut arrêter son abonnement.

On obtient plus qu’un logiciel

Les logiciels par abonnement offrent habituellement des options supplémentaires. On offrira le dépannage personnalisé, l’accès en ligne, de l’espace de stockage pour sauvegarder ses documents (personne n’aime que ses documents soient sauvegardés en ligne jusqu’à ce qu’ils les perdent!).

Avec Office 365, on offre des minutes d’appel Skype. Avec Photoshop CC, on a accès à une banque d’images de qualité (stock photos) pour ses projets.

Et au risque de me répéter, on aura toujours accès aux dernières fonctionnalités, correctifs et mise à jour du logiciel.

Ça aide à diminuer le piratage

Évidemment, en offrant des logiciels par abonnement, qui demandent une connexion régulière à leurs serveurs, les entreprises peuvent s’assurer que seuls les utilisateurs légitimes utilisent leurs produits.

Dans un sondage en 2018 par The Software Alliance, on estime que 37% des logiciels installés dans les ordinateurs personnels sont piratés.

Les versions pirates peuvent contenir des virus, et comme elles ne sont pas mises à jour, elles deviennent un risque de sécurité pour les utilisateurs et pour la réputation de l’entreprise, qui pourra se résigner à offrir les correctifs même aux versions piratées.

On ne perd pas tout: on conserve ses fichiers

Si on arrête notre abonnement, on ne perd pas tout: on pourra conserver ses documents et les ouvrir avec d’autres logiciels. Évidemment, s’ils sont sauvegardés dans les nuages, il faudra penser à les sauvegarder dans un format universel dans son ordinateur avant de fermer son compte…

Il y a toujours d’autres options moins chères – même gratuites

J’en ai parlé dans une chronique précédente: il y a des logiciels gratuits qui peuvent remplacer pratiquement tous les logiciels payants. Le consommateur n’est pas condamné à acheter les logiciels d’Adobe ou de Microsoft, pas plus qu’on est condamné à acheter une Mercedes.

Pour faire de la retouche photo, gratuitement, il y a l’application GIMP. Pour remplacer la suite Office de Microsoft, il y a Libre Office. Apple offre d’excellentes applications de bureautique (Pages, Numbers…) gratuitement. Même s’il faudra prendre quelques minutes pour apprendre leurs particularités.

Si l’on tient à conserver son logiciel, il y a Photoshop Elements, qui coûte 100 USD. Ça répond à 99% des tâches de photographie

Oui, mais ça me prend Photoshop. Oui, mais ça me prend Office…

Si ces produits sont si attrayants ou nécessaires, pourquoi ne pas le payer au prix qu’ils coûtent? Ce ne sont pas des produits essentiels – contrairement à ce qu’on veut vous faire croire. Quand on impose un logiciel dans un cours, c’est pour simplifier la tâche du prof et l’assistance technique.

Le futur: tout gratuit, on paie pour les options?

Si on se fie au jeu Fortnite, offrir son produit gratuitement est payant! On permet l’utilisation entièrement gratuite et sans restriction de son logiciel; on propose des options payantes. Le logiciel de montage DaVinci Resolve utilise la même formule: seules l’utilisation des les plus avancées demandent un abonnement. Même chose pour WordPress. On crée un grand bassin d’utilisateurs enthousiastes, et on génère des revenus en portant une attention particulière aux utilisateurs professionnels.

Une arnaque, vraiment?

Avoir un produit toujours à jour, diminuer le prix d’entrée du produit, diminuer le piratage, assurer une source de revenus régulière pour continuer de supporter et d’améliorer le produit pour leur clientèle payante… Est-ce que les entreprises sont si diaboliques de proposer leurs logiciels en version par abonnement?

C’est certain que si on s’abonne à plusieurs logiciels, on risque de payer plus cher qu’avant.

Mais… Il ne faut pas confondre Je me fais arnaquer avec Je ne veux pas payer!

P.

By Pascal Forget

Formateur. Animateur. Podcasteur, chroniqueur et journaliste en technologie et en science.